On ne le dira jamais assez, mais s’il existe un personnage de fiction passé au panthéon des figures les plus connues et populaires de par le monde, c’est bien Sherlock Holmes. Alors que les ouvrages traitant du héros de Conan Doyle se multiplient en cette fin d’année 2024, Sophia Éditions vient apporter sa boule au sapin avec la sortie, le 4 novembre 2024, de l’ouvrage intitulé Les mondes de Sherlock Holmes. Écrit par Andrew Lycett, Les mondes de Sherlock Holmes nous propose de découvrir les inspirations et autres influences ayant conduit à la création de ce héros intemporel…
Cette critique a été réalisée avec un exemplaire fourni par l’Éditeur.
Dr Watson et Mr Holmes
Entrez dans l’univers de Sherlock Holmes, et partez à la découverte de tout ce qui a inspiré Sir Arthur Conan Doyle.
Sherlock Holmes incarne, pour toujours, la figure du détective privé dans sa mission d’enquêter, de résoudre des mystères et de confondre les coupables. Très représentatif de la passion du XIXe siècle pour les sciences, le personnage reste cependant énigmatique sous bien des aspects. Cet esprit brillant, toujours en éveil, est sorti de l’imagination féconde de son créateur, Sir Arthur Conan Doyle. Mais où ce dernier a-t-il puisé son inspiration ? Dans Les Mondes de Sherlock Holmes, Andrew Lycett est parti à la recherche de toutes les sources et les influences qui ont permis à Conan Doyle de forger son personnage et tout un univers d’une extraordinaire force à l’épreuve du temps.
Sophia Éditions
Les mondes de Sherlock Holmes s’ouvre sur une introduction dans laquelle l’auteur nous décrit brièvement qui est Holmes et les différents thèmes abordés dans les chapitres qui vont suivre. Puis, nous entrons dans le vif du sujet en commençant par L’Esprit Sherlockien des lieux, qui nous propose de revenir sur les pas du détective lors de ses aventures en parallèle de ceux de son créateur. Il ne s’agit ici que de lieux situés en Grande-Bretagne, puisque le sujet des voyages plus lointain de Sherlock (en Europe et dans le monde), fera l’objet du second chapitre intitulé En Grande-Bretagne et au-delà, ou nous découvrirons que si Conan Doyle était un grand voyageur, c’était loin d’être le cas de son héros.
La partie sur Les avancées de la science va mettre en miroir la curiosité scientifique de l’écrivain irlandais, à l’aune de celle de sa création. Sur la piste des détectives, va quant à lui décrypter l’essor des agences de détectives tel qu’a pu la vivre Conan Doyle, ainsi que les progrès de la criminalistique dont il est contemporain et qui l’ont inspiré pour Holmes. Sur scène et à l’écran, nous propose de retrouver toutes les incarnations connues de l’enquêteur, que ce soit sur les planches, sur petit ou grand écran. Le chapitre nommé Couché sur le papier, va revenir sur les diverses publications ayant proposé les affaires du limier de Baker Street et les relations entre l’auteur et les maisons d’éditions.
L’art dans le sang et Quelques penchants athlétiques reviennent sur les connaissances en art et la pratique des sports par le héros, quand Entretenir la flamme conclut l’ouvrage avec la façon dont Holmes continue de survivre à son créateur, et ce grâce à ses nombreux admirateurs. Comme vous pouvez le constater, les sujets abordés sont variés et toujours explicités par plusieurs prismes différents, que ce soit les croyances, la politique, le contexte historique et social, le tout illustré par des extraits des aventures de Sherlock Holmes. Point de vue photos et illustrations, elles sont nombreuses et aident à se faire une bonne idée visuelle de ce dont il est question. Un support visuel plus que bienvenu.
La vie rêvée d’un autre
Andrew Lycett étant un écrivain et biographe d’origine anglaise, l’ouvrage proposé par Du May est une traduction d’un livre sorti le 5 octobre 2023 sous l’égide de la maison d’édition Frances Lincoln. Après avoir travaillé pendant un temps comme correspondant pour le Times en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie, il se lance dans la rédaction de biographies des grandes figures littéraires telles que Rudyard Kipling, Ian Fleming et bien évidemment Conan Doyle. Si c’est son travail sur Ian Fleming qui l’a fait connaître, il a beaucoup plus travaillé sur Sir Arthur Conan Doyle à qui il a consacré trois œuvres, la dernière en date étant le livre qui nous intéresse ici. Bien entendu, après avoir décortiqué la vie de l’écrivain dans ses travaux précédents, ce troisième opus ne pouvait qu’être blindé d’informations toutes plus intéressantes les unes que les autres.
Cela étant, replacer un écrivain célèbre dans son époque pour décortiquer ses diverses inspirations aurait pu pousser l’auteur à utiliser un style, si ce n’est pompeux, au moins complexe, qui caractérise parfois les essais de ce type. Ce n’est assurément pas le cas ici, et Andrew Lycett réussit le dur travail de rester compréhensible par tout un chacun tout en étant passablement technique. Malgré les enchaînements de dates, événements et noms cités, le lecteur n’est jamais perdu et déroule les pages les unes après les autres sans jamais se lasser. Un petit mot sur l’édition en elle-même dont la finition est d’une élégance folle, avec sa couverture rigide épaisse et son titre en lettres à relief dorées. À l’intérieur, le papier est épais et très agréable au toucher, de quoi faire son petit effet au sein de votre bibliothèque.
Le détective habite au 221
Décidément, cette fin d’années sera Sherlockienne ou ne sera pas. Après avoir découvert l’excellente BD Dans la tête de Sherlock Holmes, voici que les éditions Du May (branche de chez Sophia Editions), nous propose de retrouver le détective londonien par le prisme des influences qui ont amené son auteur à le façonner. Or, au-delà d’être une fan inconditionnelle du personnage de Conan Doyle, je suis également adepte d’en apprendre toujours plus sur les processus de création, qu’il s’agisse de manga (Réimp’!), de jeux vidéo (The Heart of A Plague Tale, La création de Prince of Persia. Carnets de bord de Jordan Mechner 1985-1993) et bien évidemment de littérature. Avec Les mondes de Sherlock Holmes, je n’ai absolument pas été déçue tant Andrew Lycett arrive à recontextualiser le personnage, tant dans la vie de son auteur que dans le contexte géopolitique, historique et culturel de ce dernier.
Ce retour dans le Londres victorien de la fin du XIXᵉ siècle se révèle passionnant et surtout éminemment instructif. Ainsi, du fait de son statut de narrateur des aventures de son ami et colocataire, de même que par leur profession commune, j’aurais naïvement pensé qu’il y avait bien plus d’Arthur Conan Doyle en Watson qu’en Holmes. Ce n’est visiblement pas aussi simple comme nous l’explique le biographe dans le chapitre sur les avancées de la science. Dans le même ordre d’idée, il est intéressant de voir l’évolution de la création en parallèle de celle de son créateur et des divers changements de mentalités de ce dernier, qui vont induire des modifications plus ou moins importantes dans le lore Sherlockien. J’attendais aussi beaucoup du chapitre traitant des diverses adaptations du détective, que ce soit au théâtre, en film ou encore en série.
Il est un peu dommage que la bande dessinée, le manga ou les productions vidéoludiques ne soient que peu, voire pas traités, mais pour autant, la liste des œuvres mettant en vedette le détective consultant est exhaustive et personne n’est oublié. J’y ai même découvert une filiation entre Sherlock Holmes et Dr House dont je n’avais absolument pas conscience, les séries en milieu médicales me rappelant les heures sombres de mon passé professionnel, je ne m’y intéresse que fort peu. Enfin, le livre, parfaitement documenté d’une part, est truffé de citations et d’extraits tirés des aventures de Sherlock Holmes, illustrant constamment les propos d’Andrew Lycett.
La finalité est double : argumenter les informations délivrées et donner envie de se replonger dans les œuvres originales. C’est d’ailleurs ce que je vais m’empresser de faire à l’issue de cette lecture qui devrait me permettre d’appréhender le héros de Conan Doyle d’un œil nouveau. Pour ça, j’ai envie de dire bravo et surtout j’ai envie de dire merci !
Avec cette traduction d’un ouvrage anglais sorti en fin d’année dernière aux éditions Frances Lincoln, Sophia Éditions rend accessible aux non-anglophones le travail de titan réalisé par Andrew Lycett. Les mondes de Sherlock Holmes permet, par une recontextualisation totale de son auteur et de son époque, d’apporter un éclairage différent sur le personnage du génial enquêteur, tout en étant une mine d’informations sur les diverses inspirations de Conan Doyle. Magnifiquement illustré de gravure d’époques, il s’agit d’une lecture incontournable pour tout fan de Sherlock Holmes qui se respecte. Comme une injection de cocaïne à 7%, au bout de quelques pages à peine, on se révèle accro, avec comme effet secondaire une envie irrépressible de se refaire l’intégrale des aventures de Sherlock. Je vais d’ailleurs de ce pas céder à la tentation…