Call of the Sea

Le jeune studio indépendant Out of the Blue, fondé en 2019 à Madrid par des vétérans de l’industrie, sort son premier jeu Call of the Sea en 2020. Il a d’abord été une exclusivité Xbox et PC avant d’être annoncé sur PS4 et PS5. Nous y incarnons Norah Everhart, professeure de dessin, à la recherche de son mari, Harry, qui a soudainement disparu lors d’une expédition en Polynésie. Quels secrets allons-nous découvrir ?

Ce test a été réalisé sur une version PS5.

Du Love et du Lovecraft

Call of the Sea nous raconte une expédition au début du XXe siècle, celle de Harry, parti cherché un remède pour sa femme dans la région de Tahiti. En effet, Norah, l’héroïne du jeu, est atteinte d’une étrange maladie, des taches brunes étant apparues sur ses mains et la rendant très faible. Personne ne sait de quoi il s’agit, personne ne semble pouvoir la soigner. Cependant, Norah reste sans nouvelles de son mari et décide de partir à sa recherche. En interrogeant les locaux, ceux-ci mentionnent une île, mais refusent de donner plus de détails car ils la pensent maudite. En continuant ses recherches, elle fait la connaissance d’un capitaine qui lui parle de Lady Shannon, une baleinière, qui a disparu près de l’île visitée par Harry.

Call of the Sea s’ouvre sur un écran noir avec une langue inconnue qui semble s’adresser à notre personnage. Juste après, nous nous retrouvons dans les fonds marins, avec des éléments de la vie de tous les jours engloutis, flottant ça et là, à la façon du terrier d’Alice au Pays des Merveilles. Enfin, nous nous réveillons de ce cauchemar dans ce qui semble être la cabine d’un bateau. Cabine que l’on va pouvoir explorer à la façon d’un point and click pour en apprendre plus sur Norah.

C’est en explorant notre cabine que l’on découvre notre carnet, qui va nous suivre pendant l’aventure. Dans ce dernier, Norah y consigne tous les indices qu’elle trouve et qu’elle ne souhaite pas oublier, et elle y tient également un journal intime qui nous permet de comprendre son historique et ce qui l’amène sur ce bateau. Nous apprenons, entre autres, qu’à la mort de sa mère, celle-ci lui lègue dans son testament une étrange boîte à musique, qui aura son importance dans l’histoire.

En effet, depuis que Norah possède cet objet, elle fait régulièrement des cauchemars, semblable à celui que nous avons vécu au début du jeu. La boîte à musique étant, bien évidemment, présente dans ses songes… C’est alors que l’on se retrouve face à notre première énigme, un coffre verrouillé par un code secret qui contient des objets envoyés par une personne inconnue concernant son mari. L’île est en vue, il est temps de se préparer à aller l’explorer… Les connaisseurs auront reconnu des références à l’univers de Lovecraft, le monde marin, les expéditions mystérieuses, ainsi qu’une emphase particulière sur l’évolution psychologique des personnages. Le jeu poursuit dans cette voie afin de nous livrer un final d’une efficacité redoutable, que l’écrivain lui-même n’aurait pas reniée. 

First Person and Click 

Call of the Sea est disponible en version anglaise uniquement, sous-titré en français pour ma part. L’actrice qui double Norah lui donne vraiment vie, j’ai beaucoup aimé ses réflexions et réactions lorsque j’ai interagi avec les différents éléments. Ses remarques tantôt teintées d’humour, tantôt inquiètes pour son mari, ou encore pleines de doutes, rendent notre personnage très vivant et attachant. Cela est encore renforcé par la vue à la première personne.

L’interaction avec les objets et autres éléments se fait à la façon d’un point and click à l’ancienne : une icône spécifique selon l’interaction disponible nous indique quand il est possible d’interagir avec l’élément (commenter, prendre, lire, observer). J’ai beaucoup aimé que l’on puisse manipuler certains objets ou documents en les faisant tourner pour découvrir de nouveaux indices ou en ayant la possibilité de zoomer dessus, comme on peut le faire dans d’autres jeux (Uncharted 4 avec les collectibles par exemple). 

Voyage Voyage

Le jeu a aussi un point de vue informatif. En effet, lorsque nous sommes sur l’île et que nous interagissons avec les éléments du décor, Norah nous explique leur usage, ce qui permet de nous mettre à son niveau de connaissance, et ainsi découvrir les us et coutumes de la culture polynésienne. Je ne sais toutefois pas à quel point la véracité culturelle du jeu est poussée car nous découvrirons vite que le jeu y apporte par la suite sa propre mythologie. Le fait que ce soit intégré dans l’histoire lors des recherches de Norah rend le tout très digeste et très accessible.

De plus, le dépaysement est total, avec des tonalités vives et chatoyantes, des aplats de couleurs, un style relativement rond et cartoon, ainsi que de belles ambiances lumineuses et de superbes décors exotiques. On profite d’autant plus de ces magnifiques scènes grâce à l’absence complète d’ATH. Cependant, j’ai trouvé que certains graphismes étaient inégaux, il arrive parfois que l’on soit en présence d’éléments totalement lisses cohabitant avec des éléments pixelisés, donnant à l’ensemble une impression de mauvaise qualité d’image. Cela est dommage, au vu des efforts qui ont été fournis pour créer un environnement aussi fouillé.

La Curiosité n’est Pas un Vilain Défaut

L’une des choses que j’ai vraiment appréciée dans Call of the Sea, c’est le fait de découvrir les différents membres de l’expédition disparus à travers leurs effets personnels abandonnés, que nous pourrons manipuler et déchiffrer. On apprendra par exemple, que certains personnages n’aiment pas beaucoup le mari de Norah, ou que d’autres encore, prennent soin de leur personne, même au beau milieu de la jungle, le tout ponctué par les remarques de Norah sur un ton très humoristique.

Le jeu est ponctué d’énigmes et de puzzles à résoudre pour avancer. Bien que peu difficiles au début du jeu, elles se corsent au fur et à mesure de l’aventure. L’exploration, la curiosité et l’observation seront indispensables, car quand bien même Norah notera consciencieusement ses découvertes dans son carnet (les symboles qu’elle croise, ainsi que les notes laissées çà et là par son mari disparu), il faudra explorer méticuleusement les lieux afin d’obtenir des indices supplémentaires indispensables à la résolution des énigmes. Vous l’aurez compris, le jeu pousse à la curiosité, à l’exploration et à l’expérimentation.

Électrique et Mécanique, Vive les Énigmes 

Dans l’ensemble, les différentes énigmes qui constituent le gameplay principal du jeu sont plutôt bien pensées et agréables à résoudre, offrant différents niveaux de technologies (début du XXe oblige), mêlant électrique et mécanique. Elles se veulent diversifiées, avec une bonne courbe de progression dans la difficulté.

Cependant, il a pu m’arriver plusieurs fois d’être complètement perdue, soit à cause d’un environnement trop vaste à explorer, soit de certaines zones du jeu particulièrement sombres (aucun système d’éclairage portatif prévu par le jeu), soit encore par l’absence d’indices sur les façons d’interagir avec les éléments (il m’est par exemple arrivé de connaître la solution de l’énigme, mais de ne pas savoir comment l’appliquer avec les objets qui l’entouraient). Il faudra donc parfois faire preuve de créativité afin de comprendre ce qui trottait dans la tête des développeurs au moment de la création de certains puzzles.

Dernier petit bémol, les déplacements de Norah peuvent sembler particulièrement lents dans certaines zones étendues où l’on doit réaliser plusieurs aller-retours (il existe une commande pour le sprint, mais qui n’en a que le nom…). Enfin, bien que certaines énigmes puissent paraître artificielles (certaines actions simples que ne fait pas Norah et qui la forcent à passer par l’endroit voulu par le jeu, l’absence de saut, par exemple, pouvant créer de l’incohérence et donc casser l’immersion dans le jeu), l’ensemble reste très agréable à jouer. 

Symphonique et Pacifique

Concernant la musique de Call of the Sea, elle est puissante avec une orchestration symphonique, cuivres et percussions sont au rendez-vous, rappelant les thèmes épiques des premiers films d’aventure hollywoodiens. Le tout est ponctué, particulièrement en début de jeu, d’instruments plus traditionnels rappelant les musiques des régions du Pacifique. Mais le jeu n’est pas qu’une accumulation de thèmes musicaux puisque certains moments de suspense ou de tension se parcourront dans le silence, parfois même sous les chuchotements et les gémissements, le port du casque renforçant comme il le faut cette ambiance pesante.

Pour conclure…

Avec une histoire classique reprenant tous les codes du genre, mais d’une très belle efficacité, Call of the Sea saura vous plonger dans l’ambiance des films d’aventure hollywoodiens du début du XXe siècle. Le tout saupoudré de références à Lovecraft sans tomber dans la facilité. Sa direction artistique est particulièrement soignée, parfois en deçà des standards du genre, mais réhaussée par des atmosphères richement travaillées, mêlant nostalgie, exotisme et mythologie. Ajoutons à cela une BO particulièrement efficace, alternant les compositions symphoniques et bruits d’ambiance. Avec un gameplay mélangeant point and click classique et vue à la première personne, le jeu sait donner envie d’explorer les différents environnements grâce aux nombreux détails qui les composent et aux sympathiques énigmes qui les ponctuent. Les énigmes justement, étant le système de jeu principal, se devaient d’être créatives, variées, et d’un niveau de difficulté progressif, le contrat est rempli. Petit plus, la fin du jeu est particulièrement soignée avec une psychologie de personnages très bien travaillée, ainsi que plusieurs renouvellements d’environnements, toujours plus beaux les uns que les autres.

La  note  de la  rédaction

3-5/5

Les notes de la rédaction

Les points positifs

Direction artistique

Diversité des énigmes

Histoire et psychologie du personnage

Inspirations cinématographiques et littéraires

Les points négatifs

La mécanique de certaines énigmes

Graphismes parfois inégaux

Lenteur physique du personnage

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