Lentement, mais sûrement, l’éditeur Ototo continue sa parution de la série Bungô Stray Dogs écrite par Kafka Asagiri et dessinée par Harukawa Sango. C’est donc plus d’un an après le dernier volume que nous avons pu mettre la main sur Bungô Stray Dogs tome 23 qui est sorti en librairie le 23 février 2024. L’occasion pour nous de continuer à suivre le parcours de Dazai et Dostoïevski, incarcérés à la prison de Meursault, ainsi que le combat de leurs équipiers respectifs qui se font face au sein d’un aéroport. Embarquement immédiat !
Cette critique a été réalisée avec un exemplaire fourni par l’Éditeur.
La ligue des détectives extraordinaires
Après avoir été expulsé de son centre d’accueil, Atsushi Nakajima se retrouve seul et à la rue… il rencontre alors un étrange jeune homme du nom d’Osamu Dazai. Ce dernier fait partie de l’Agence des Détectives armés, une troupe d’enquêteurs aux pouvoirs paranormaux, à la recherche d’un mystérieux tigre mangeur d’hommes. Atsushi semble avoir d’étroits liens avec ce tigre, et se retrouve enrôlé malgré lui parmi ces fameux Détectives sur l’initiative de Dazai. Action et batailles entre illustres écrivains à Yokohama !
Ototo
Bungô Stray Dogs s’attache au pas du jeune Atsushi Nakajima qui se fait un jour expulsé de l’orphelinat où il vivait jusque-là, car un tigre blanc géant qui semble le suivre comme son ombre terrorise le personnel et les autres enfants. Seul et sans nulle part où aller, Atsushi est sur le point de mourir de faim quand il sauve par hasard de la noyade Osamu Dazai, qui, loin de le remercier, le houspille pour avoir fait échouer sa tentative de suicide. Rejoint par le collègue de Dazai, Kunikida, le garçon apprend que les deux hommes font partie de l’Agence des Détectives Armés qui fait régner la justice à Yokohama.
Pire encore, Dazai révèle à Atsushi qu’il est l’objet de leur mission en cours et que le tigre qu’il craint tant et qui paraît le poursuivre est en fait… lui-même ! Devant la proposition d’intégrer l’Agence, Nakajima n’hésite pas et rejoint l’organisation à laquelle il s’intègre parfaitement. Malheureusement, la Mafia Portuaire a, elle aussi, des projets pour le tigre blanc et Atsushi va apprendre à connaître l’ennemi le plus puissant de l’Agence des Détectives, dont a autrefois fait partie Dazai. Cette guerre va cependant tourner court avec l’apparition d’un ennemi commun, encore plus puissant, qui va amener les deux factions à collaborer.
Après avoir été piégée par l’ordre des Anges Déchus, l’Agence est désormais poursuivie par le gouvernement comme terroristes, Dazai est incarcéré à la prison de Meursault et ses alliés poursuivis par la faction gouvernementale des Chiens de Chasse commandé par le héros de guerre Ôchi Fukuchi. Détenteur du pouvoir de Bram Stoker, maître des vampires, les détectives sont dans une très mauvaise position face au commandant Fukuchi qui poursuit ses propres desseins.
« J’ai un projet : devenir fou ! »
C’est aux côtés de Chûya, transformé en vampire, que Dostoïevski débute sa tentative d’évasion de la prison de Meursault… Dazai, accompagné de Sigma, lance à son ancien camarade un dernier avertissement. Pendant ce temps, le Chien de Chasse Tecchô se retrouve nez à nez avec Kenji pour un combat d’anthologie, alors qu’Atsushi se fait capturer par Teruko et que Fukuzawa et Fukuchi se retrouvent face à face pour un dernier duel…
Ototo
Alors que dans le dernier volume, nous avions laissé Atsushi face à Teruko et Kenji en plein combat avec Tecchô, ce tome 23 de Bungô Stray Dogs s’ouvre avec la suite de ces deux duels dont l’un abouti à la capture d’Atsushi et l’autre en match nul. Pendant ce temps, Dazai et Dostoïevski, toujours empoisonnés, tentent de remporter le jeu de la mort imposé par Gogol. Accompagné de Sigma, Dazai ne montre aucun signe d’inquiétude face à l’avancée de son adversaire, ce qui étonne son acolyte.
Il va alors dévoiler son plan et l’étendue de son machiavélisme à un sigma médusé. De son côté, Aya est toujours en fuite avec Bram Stoker et se retrouve acculée par Akutagawa transformé en vampire. Décidé d’en finir rapidement avec l’Agence, Fukuchi décide de prendre les choses en main, mais il voit surgir devant lui son ancien camarade, le patron des Détectives, Fukuzawa et la lutte promet d’être sans pitié entre les deux vieux amis.
L’idiot et l’étranger
Cela fait maintenant 23 tomes que je suis avec plaisir les aventures de l’Agence des détectives Armés et plus précisément l’évolution d’Atsushi au sein de celle-ci et je reste toujours aussi dithyrambique sur la qualité de cette série. Cependant, depuis que j’ai rattrapé le rythme de parution, je m’aperçois de la complexité de comprendre efficacement le récit mis en place par Kafka Asagiri si on ne le lit pas en continu. C’est d’ailleurs l’un des principaux griefs que j’avais pu avoir dans ma critique du tome 22 de Bungô Stray Dogs et il est désormais acquis que la multiplicité des trajectoires des personnages couplé au temps de parution n’aide pas à garder en mémoire les subtilités pourtant essentielles du récit.
Toutefois, proposer plusieurs embranchements scénaristiques à cet avantage de permettre au lecteur d’avoir toujours un combat qui va le passionner. En ce qui me concerne, c’est le duel Dostoïevski Dazai qui remporte mon suffrage tant cette course contre la mort entre ces deux cerveaux est étonnante de machiavélisme d’un côté comme de l’autre. Je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer que dans les murs de Meursault, Dazai se montre de plus en plus comme un être froid, calculateur et même dénué de scrupules dans sa quête du décès de Dostoïevski. Un changement que j’attribue, peut-être à tort, à l’endroit où se déroule cette partie d’échecs.
En effet, après plusieurs tomes de Bungô Stray Dogs passés en compagnie de Kafka Asagiri, je connais la grande culture littéraire de l’auteur et je suis persuadé que nommer la prison Meursault, du nom du personnage principal du roman l’Étranger d’Albert Camus, n’est absolument pas anodin. Cela fait d’autant plus sens quand on sait que Meursault est un être dénué de sentiments comme le remords ou l’empathie et dans la vie duquel ne prédomine qu’un ennui abyssal. En ce sens, l’évolution du personnage de Dazai au sein de la prison paraît suivre un peu le même chemin, ce qui est moins flagrant pour Fiodor qui a une personnalité déjà assez proche de celle de Meursault.
Pour autant, les destinées des autres personnages n’en sont pas moins intéressantes, mais elle avance moins vite et donc il est difficile de réellement s’y arrêter, même si j’attends avec toujours autant d’impatience le prochain volume de Bungô Stray Dogs.
C’est donc un tome 23 de Bungô Stray Dogs essentiellement centré sur le combat que nous avons pu découvrir et il est clair que la multiplicité des intrigues parallèles a de quoi perdre un peu le lecteur et dilue un peu l’impact des divers événements. Heureusement, l’enchaînement fluide et somme toute logique de l’action réduit ce sentiment d’éparpillement, même s’il sera nécessaire de relire l’arc depuis le début afin de ne pas passer à côté d’éléments primordiaux. Cependant, le scénario est toujours aussi passionnant, malgré une impatience qui commence à poindre de savoir comment tout cela va se terminer pour les uns comme pour les autres. Réponse (ou pas d’ailleurs) dans le prochain tome de Bungô Stray Dogs dont la date de sortie n’est pour l’instant pas encore connue.
